Réduire ou diagonaliser une matrice, voilà clairement l’une des questions les plus classiques et récurrentes aussi bien en épreuves EDHEC/EM qu’en épreuves parisiennes. Mais c’est également une notion qui fait appel à un éventail de notions de cours très large qu’il te faut maîtriser sur le bout des doigts si tu veux espérer décrocher une excellente note en maths aux concours.
C’est pourquoi, pas de panique, Major-Prépa t’a préparé un résumé de toutes les étapes à suivre ainsi que toutes les différentes méthodes possibles afin que tu deviennes un.e expert.e de la diagonalisation.
Quel est l’intérêt de diagonaliser une matrice ?
Soit \(n \in \mathbb N^*\).
Avant de commencer, la question que l’on peut se poser est : Pourquoi la réduction de matrice (ou même d’endomorphismes) est-elle une notion si importante du programme ? Les concepteurs de sujets lui accordent en effet énormément de questions et d’exercices.
C’est que diagonaliser une matrice est une façon très commode en mathématiques de simplifier son écriture et de la rendre plus facile à étudier. Par exemple, il devient en effet beaucoup plus aisé de calculer n’importe quelle puissance d’une telle matrice, étant donné que l’on connaît celles des matrices diagonales et que : \(A = PDP^{-1} \Rightarrow \forall n \in \mathbb{N} , A^n = PD^nP^{-1}\).
Première étape : vérifier que la matrice est diagonalisable
Dans la plupart des sujets, on te demandera toujours de d’abord montrer que ta matrice \(A\) est diagonalisable avant de te demander de la réduire. Et si ce n’est pas le cas, ce sera important pour la rigueur et la clarté de ta copie que tu le précises avant de commencer tes calculs pour diagonaliser ta matrice.
Avant de commencer, un petit rappel de toutes les façons de démontrer que ta matrice est diagonalisable s’impose donc.
Soit \(A\) une matrice carrée de dimension \(n\).
- \(A\) est symétrique réelle (petite propriété qui ne paie pas de mine, mais qui est toujours d’une grande aide et que tu auras à utiliser au moins une fois lors de tes concours).
- Elle possède \(n\) valeurs propres distinctes.
- Tu as déjà montré que la somme des dimensions de ses sous-espaces propres est égale à n.
- Il existe une base de \(\mathcal{M}_{n,1} (\mathbb{R})\) composée de ses vecteurs propres.
Deuxième étape : trouver les valeurs propres de la matrice à diagonaliser
Comme tu l’auras compris, cette étape est absolument cruciale pour diagonaliser ta matrice. Car à moins que tu aies pu utiliser l’argument formidable de la matrice symétrique réelle, elle va te servir à la fois à montrer que ta matrice est diagonalisable et à la diagonaliser.
Petite remarque : si tu connais le spectre de l’endomorphisme \(f\) associé à ta matrice \(A\), il devient bien évidemment inutile d’effectuer ces démarches étant donné que leurs spectres sont identiques.
Méthode 1 : utiliser un polynôme annulateur
Cette méthode de diagonalisation de matrice revient fréquemment dans les sujets, notamment ceux de type EDHEC/EM. En début d’exercice, les concepteurs te proposeront souvent de calculer une puissance particulière de ta matrice \(A\), que tu pourras ensuite exploiter afin d’en trouver un polynôme annulateur. Dans les sujets de type Parisienne, ils pourront parfois te demander d’en trouver un par toi-même, sans orienter tes recherches vers une puissance en particulier.
Une fois trouvé le polynôme \(P\) qui annule ta matrice \(A\), il te faut chercher ses racines. Comme d’habitude, teste quelques racines évidentes telles que \(1\), \(-1\) ou \(2\). La plupart du temps, elles ne sont pas très compliquées à trouver, car le polynôme annulateur est souvent de degré \(2\).
Ensuite, il ne te reste plus qu’à utiliser la propriété du cours qui t’indique que le spectre de ta matrice \(A\) est inclus dans l’ensemble des racines du polynôme \(P\). Attention, il est bien écrit « inclus » et non « égal ». Donc, si toutes les valeurs propres de \(A\) sont bien des racines du polynôme \(P\), chaque racine de \(P\) est elle une valeur propre de \(A\) potentielle seulement. Tu dois les tester une par une.
Par exemple, posons \(\frac{1}{2}\) et \(2\), les deux racines réelles du polynôme \(P\) annulateur de \(A\), matrice carrée de dimension \(2\). Et posons \(X = \begin{pmatrix} x \\ y \end{pmatrix}\) avec \(x\) et \(y\), deux réels quelconques. Tu n’as plus qu’à résoudre tour à tour les systèmes \(AX= \frac{1}{2}X\) et \(AX=2X\).
Pour chaque système, s’il n’a pas de solution, c’est que la racine du polynôme \(P\) en question n’est pas valeur propre de \(A\). Si au contraire tu peux le résoudre, alors tu viens de trouver à la fois une valeur propre de la matrice \(A\) et une base du sous-espace propre qui lui est associé.
Méthode 2 : cas des matrices carrées de dimension \(2\)
Si ta matrice \(A\) est une matrice carrée de dimension \(2\), trouver ses valeurs propres devient très facile (à condition bien sûr de faire attention à ne pas faire d’erreur de calcul).
Dans ce cas, il te suffit de trouver les différentes solutions \(\lambda\) de l’équation : \(det(A-\lambda I_n) = 0\). Tu auras donc automatiquement l’ensemble des valeurs pour lesquelles la matrice \(A-\lambda I_n\) est non inversible, et donc, par définition, l’ensemble des valeurs propres de la matrice \(A\).
Par exemple, posons la matrice \(A=\begin{pmatrix} a & b \\ c& d\end{pmatrix}\). On a alors : \(A-\lambda I_n =\begin{pmatrix} a – \lambda & b \\ c& d- \lambda \end{pmatrix}\).
Les valeurs propres de la matrice \(A\) seront ainsi l’ensemble des solutions de l’équation : \((a -\lambda)(d -\lambda) – bc = 0\).
Méthode 3 : méthode universelle de diagonalisation de matrice
Si tu n’es pas en dimension \(2\) et que les questions préliminaires ne t’ont pas guidé.e vers un polynôme annulateur, aucun problème, voici la méthode qui fonctionne à tous les coups pour trouver les valeurs propres d’une matrice. Spoiler alert : elle est simple mais souvent très fastidieuse et il est facile de s’emmêler les pinceaux avec les calculs. Donc, reste bien concentré.e et n’hésite pas à prendre ton temps.
En fait, tu vas simplement revenir à la définition de ce qu’est une valeur propre. Ainsi, \(\lambda\) est valeur propre de la matrice \(A\) de dimension \(n\) si :
\(\exists X \in \mathcal{M}_{n,1}(\mathbb{R}) \backslash \{0\}, AX = \lambda X \Leftrightarrow \exists X \in \mathcal{M}_{n,1}(\mathbb{R}) \backslash \{0\},(A- \lambda I_n)X = 0 \).
Ainsi, \(\lambda\) est valeur propre de \(A\) si la matrice \(B = A-\lambda I_n\) est non inversible. Il suffit donc de trouver l’ensemble des réels \(\lambda\) tel que ce soit le cas. Pour cela, tu vas pouvoir ressortir la méthode que tu as si souvent utilisée en première année : le pivot de Gauss !
Grâce à une suite d’opérations élémentaires, modifie les lignes de la matrice \(B\) jusqu’à obtenir une matrice triangulaire. Tu n’auras alors plus qu’à trouver les valeurs des \(\lambda\) en lesquels les coefficients diagonaux de cette matrice sont nuls (souviens-toi des propriétés de première année), et bingo, tu auras trouvé le spectre de la matrice \(A\) !
Méthode bonus : si on connaît déjà une matrice semblable
Enfin, petite propriété qu’il est toujours bon de retenir : deux matrices semblables ont les mêmes valeurs propres. Donc, si plus haut dans l’exercice tu as étudié une matrice semblable à la matrice que tu cherches à diagonaliser, pense bien à réexploiter ces résultats !
Cela t’épargnera des calculs et t’évitera de nombreuses erreurs d’inattention potentielles. Elle est surtout utile pour aller vite dans les oraux de maths et montrer que tu as la fibre mathématique.
Troisième étape pour diagonaliser ta matrice : trouver les sous-espaces propres
Maintenant que tu es le roi ou la reine des valeurs propres, il convient à présent de trouver leurs sous-espaces propres associés, essentiels pour réussir à diagonaliser ta matrice. Et là aussi, il existe plusieurs méthodes.
Méthode 1 : cas général
Afin de trouver les sous-espaces propres associés aux valeurs propres de ta matrice, voici la technique qui fonctionne à tous les coups. Il te suffit d’utiliser la même méthode que celle que nous t’avons donnée plus haut pour vérifier que les racines d’un polynôme de ta matrice étaient aussi une de ses valeurs propres.
Il te suffit donc de résoudre le système : \(AX = \lambda X\). En posant : \(X = \begin{pmatrix} x \\ y \end{pmatrix}\) avec \(x\) et \(y\) deux réels quelconques.
Par exemple, supposons que : \(AX = \lambda X \Leftrightarrow X \in \text{Vect} \left (\begin{pmatrix} 1\\ 0 \end{pmatrix} , \begin{pmatrix} 0\\ -2 \end{pmatrix} \right ) \).
Alors : \(E_\lambda\) = \(\text{Vect} \left (\begin{pmatrix} 1\\ 0 \end{pmatrix} , \begin{pmatrix} 0\\ -2 \end{pmatrix} \right) \).
Méthode 2 : cas particuliers
Certaines situations vont te permettre de trouver les sous-espaces propres de ta matrice \(A\) un peu plus rapidement.
- Ainsi, lorsque \(0\) est valeur propre de la matrice \(A\) et que tu connais le rang de cette dernière, le théorème du rang te donnera directement la dimension du sous-espace propre associé à la valeur propre \(0\). En effet, n’oublie pas que : \(E_\lambda = \text{Ker}(A – \lambda I_n)\). Ainsi, \(E_0 = \text{Ker}(A)\).
- Si ta matrice \(A\) est une matrice carrée de dimension \(n\) et qu’elle possède exactement \(n\) valeurs propres distinctes, n’oublie pas que le cours t’indique directement que chacun de leurs sous-espaces propres associés sont de dimension \(1\).
- Attention, pour deux matrices semblables, contrairement à leurs valeurs propres, leurs sous-espaces propres associés sont différents. Tu ne pourras donc pas ici réutiliser des résultats déjà trouvés.
Dernière étape : écrire la réduction pour terminer de diagonaliser ta matrice
À présent, tu as toutes les clés pour réussir à diagonaliser ta matrice et ce qu’il te reste à faire est très simple.
Afin d’écrire ta matrice \(A\) sous la forme \(PDP^{-1 }\), tu dois d’abord écrire la matrice diagonale \(D\). Rien de plus facile : écris une matrice diagonale de même format que \(A\) avec comme coefficients diagonaux les valeurs propres de \(A\).
Ensuite, pour trouver ta matrice \(P\), il te suffit d’écrire à nouveau une matrice de même dimension dont les colonnes seront les sous-espaces propres associés aux valeurs propres de \(A\), placés dans le même ordre que celui que tu leur as attribué dans la matrice \(D\).
Par exemple : Soit \( D = \begin{pmatrix} \lambda _ {1} & 0 & 0 \\ 0 & \lambda _ {2} & 0 \\ 0 & 0 & \lambda _ {3} \end{pmatrix}\). Et \(E _{\lambda _ {1}} =\text{Vect} \left (\begin{pmatrix} 1\\ 2\\ 0 \end{pmatrix} \right)\), \(E_{\lambda _ {2}} = \text{Vect} \left (\begin{pmatrix} 0\\ -3 \\ 1 \end{pmatrix} \right) \) et \(E_{\lambda _ {3}} = \text{Vect} \left (\begin{pmatrix} 2 \\ – 1 \\ \frac{1}{2} \end{pmatrix} \right)\), alors : \( P = \begin{pmatrix} 1 & 0 & 2 \\ 2 &-3 & -1 \\ 0 & 1 & \frac{1}{2} \end{pmatrix}\).
Enfin, pour trouver la matrice \(P^{-1}\), il te faut trouver l’inverse de la matrice \(P\). Pour cela, tu peux utiliser les méthodes d’inversion apprises en première année. Parmi ces dernières, tu as notamment le pivot de Gauss appliqué simultanément à la matrice identité \(I_n\). Mais pour plus de précisions sur les méthodes d’inversion d’une matrice, aide-toi de cet article !
Et voilà, à présent avec un peu d’entraînement, diagonaliser une matrice sera un jeu d’enfant pour toi !
Tu souhaites continuer à étudier les questions classiques qui reviennent régulièrement dans les sujets de concours ? Jette alors un œil sur cet article : 4 questions classiques d’analyse en maths ECG – EDHEC/emlyon (#1)
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