Chaque année, les classes prépas ECT doivent composer avec un nouveau thème de culture générale. Pour 2026, c’est « Juger » qui sera au cœur des dissertations et des oraux de culture G. Un thème à la fois juridique, moral et philosophique qui questionne le rôle de la justice, du jugement personnel et collectif, et les critères qui fondent nos décisions. Voici une sélection d’œuvres à connaître absolument pour prendre de l’avance sur la rentrée et nourrir ton propos avec des références solides.
Les œuvres philosophiques
Gorgias (Platon)
Résumé
Dans ce dialogue, Socrate discute avec Gorgias (un sophiste), Polos et Calliclès à propos de la rhétorique et de la justice. Socrate critique l’usage du discours persuasif qui manipule l’opinion sans se soucier du vrai et du juste. Il oppose cette parole flatteuse au discours philosophique, qui vise le bien et la vérité.
Pourquoi la connaître ?
Platon interroge ici la nature du jugement juste. Peut-on juger de manière objective quand la parole peut séduire, influencer, tromper ? Il montre que le jugement authentique doit être rationnel et orienté vers le bien commun, non vers le plaisir ou l’intérêt personnel.
Comment l’utiliser ?
- Pour distinguer jugement objectif et manipulation de l’opinion.
- Pour critiquer les jugements guidés par les passions ou les intérêts.
- À placer quand il s’agit de montrer le danger d’un jugement social ou médiatique hâtif.
Critique de la faculté de juger (Kant)
Résumé
Kant s’intéresse à la manière dont l’homme juge sans loi préexistante. Il distingue le jugement déterminant (qui applique une règle à un cas particulier) du jugement réfléchissant (qui, face à l’incertitude, cherche la règle appropriée). Il développe aussi l’idée de jugement esthétique, subjectif mais communicable.
Pourquoi la connaître ?
C’est un texte fondamental pour penser le jugement dans l’incertitude : lorsque les lois sont insuffisantes, c’est la faculté de juger qui guide. Kant montre aussi que juger suppose toujours une part d’interprétation et de subjectivité.
Comment l’utiliser ?
- Pour défendre l’idée qu’on ne peut pas tout codifier : certains jugements échappent aux lois strictes.
- Pour réfléchir au rôle de l’intuition et de la réflexion dans la décision.
- Parfait à mobiliser dans un sujet sur les limites du droit ou les dilemmes moraux.
Eichmann à Jérusalem (Hannah Arendt)
Résumé
Arendt couvre le procès d’Adolf Eichmann, fonctionnaire nazi chargé de la déportation des juifs. Elle décrit un homme médiocre, sans haine, qui obéissait simplement aux ordres. D’où son concept célèbre : la banalité du mal.
Pourquoi la connaître ?
Elle interroge la capacité à juger des actes monstrueux commis par des individus « normaux ». Arendt montre que juger ne se réduit pas à appliquer des lois : il faut parfois inventer un cadre nouveau pour qualifier et condamner l’impardonnable.
Comment l’utiliser ?
- Pour montrer les limites des systèmes juridiques face aux crimes extrêmes.
- Pour interroger la responsabilité individuelle dans des systèmes totalitaires.
- À citer sur les dilemmes moraux et la nécessité de juger au-delà de la simple obéissance.
Les œuvres littéraires
L’Étranger (Albert Camus)
Résumé
Meursault, un homme indifférent à tout, tue un arabe sur une plage. Lors de son procès, c’est moins son crime qui est jugé que son absence d’émotion (il n’a pas pleuré à l’enterrement de sa mère). Le verdict devient un jugement moral autant que juridique.
Pourquoi la connaître ?
Camus montre que les jugements humains dépassent les faits pour s’attacher aux comportements et aux normes sociales. Le procès devient un prétexte à juger la différence et la marginalité.
Comment l’utiliser ?
- Pour montrer que juger implique toujours un regard social et moral.
- Pour illustrer l’arbitraire des normes et des valeurs dans le jugement.
- Idéal dans un sujet sur le jugement social, l’exclusion, ou le rapport entre individu et société.
Le Procès (Franz Kafka)
Résumé
Josef K. se réveille un matin accusé d’un crime qu’on ne lui nomme jamais. Il tente de comprendre et de se défendre face à une institution judiciaire incompréhensible et toute-puissante. Le roman dénonce l’absurdité d’un système dans lequel l’homme est broyé.
Pourquoi la connaître ?
Kafka symbolise l’angoisse du jugement opaque et déshumanisé. Il critique les systèmes dans lesquels la justice devient mécanique et absurde, où personne ne sait qui juge, pourquoi, ni comment.
Comment l’utiliser ?
- Pour dénoncer l’opacité des institutions et la perte de sens dans le jugement.
- Pour illustrer l’angoisse de l’individu face aux structures collectives.
- Excellent pour un sujet sur la déshumanisation de la justice.
Les films essentiels
Douze hommes en colère (1957)
Résumé
Dans un huis clos, douze jurés doivent décider du sort d’un adolescent accusé de meurtre. Au départ, onze jurés le croient coupable, mais un seul sème le doute et fait peu à peu vaciller les certitudes.
Pourquoi le connaître ?
Ce film montre le rôle du doute dans le jugement humain. Il dénonce les préjugés, la facilité des jugements hâtifs et la nécessité d’un débat contradictoire.
Comment l’utiliser ?
- Pour valoriser le doute raisonnable comme fondement de tout jugement équitable.
- Pour critiquer les jugements basés sur les apparences et les stéréotypes.
- À mobiliser sur la notion de responsabilité collective dans la prise de décision.
Philadelphia (1993)
Résumé
Andrew Beckett, brillant avocat atteint du sida, est licencié en raison de son homosexualité. Il décide d’attaquer en justice son ancien cabinet. Le procès confronte préjugés et droits fondamentaux.
Pourquoi le connaître ?
Le film questionne les critères implicites qui influencent le jugement social et juridique. Il montre que juger, c’est aussi se confronter à ses propres préjugés et accepter l’évolution des normes sociales.
Comment l’utiliser ?
- Pour réfléchir aux jugements moraux et discriminatoires.
- Pour interroger la capacité du droit à défendre les minorités.
- Idéal dans un sujet sur la justice sociale et l’équité.
Les Misérables (2019)
Résumé
Dans une cité de Seine-Saint-Denis, un incident entre une brigade anticriminalité et des jeunes déclenche des violences. Le film met en scène la défiance des habitants envers les forces de l’ordre.
Pourquoi le connaître ?
Il interroge qui juge qui dans les rapports de pouvoir, et comment l’autorité peut légitimer la violence. Il montre aussi la difficulté à rendre une justice équitable dans un contexte de tensions sociales.
Comment l’utiliser ?
- Pour montrer les rapports de force dans le jugement social et institutionnel.
- Pour dénoncer les abus de pouvoir et la légitimité contestable de certains jugements.
- À citer dans un sujet sur l’injustice, les institutions et les tensions sociales.
Conclusion
Maîtriser ces œuvres, c’est disposer d’une palette d’exemples riches, nuancés et légitimes pour structurer tes dissertations et briller à l’oral. Elles te permettront d’aborder :
- les tensions entre droit et morale ;
- le rôle des passions et des préjugés dans le jugement ;
- la difficulté de juger dans l’incertitude ou l’extrême ;
- la question de la légitimité des juges et des institutions.
Le conseil Major : commence dès maintenant par L’Étranger, Douze hommes en colère et Gorgias. Tu pourras ensuite t’appuyer sur Kant, Arendt et Kafka pour densifier tes copies et sortir des références vues et revues.